[Historique] Heshyr

Aethyn regardait le temple qui se dressait devant elle et devant toute la ville de Khaine. Ce bâtiment en disait long sur l’emprise qu’avait le culte sur la ville d’Har Ganeth. Il avait été construit sur une haute colline au pied de laquelle toute la cité était agenouillée. La ville ne vivait que pour le culte, et chaque soir, elle devenait un immense autel d’offrandes au dieu à la main sanglante. Aethyn ressentait un immense respect pour les maîtres de ce culte et pour ce Temple impressionnant. La crainte de ne pouvoir satisfaire la soif de son dieu commençait à se faire sentir, mais il fallait avoir confiance à ses lames, et en sa propre soif de sang. Aethyn tâta sa sacoche noire, où étaient enfermées toutes ses offrandes au dieu, puis pénétra dans le temple, le cœur haletant.
Ses offrandes avaient été généreuses, et c’est peut être la seule raison qui a fait qu’elle ne fut pas offerte au chaudron de sang immédiatement. Les prêtres du Temple n’avait pas perçu en elle la foi rouge, et l’avait mise à l’épreuve. Toute la nuit, elle devrait alimenter les piles de crânes qui se trouvaient partout dans la ville. Chaque druchii qu’elle rencontrerait ne serait bon qu’à donner sa tête au dieu meurtrier qu’elle adorait. Cette nuit, les rues de la cité furent plus rouges encore qu’à l’habituée. Aethyn l’avait parcourue intégralement, à la recherche de n’importe quel pèlerin, habitant ou garde qui se présenterait sur la route. Elle perdit le compte de ses victimes quand elle fit face à une patrouille entière d’exécuteurs du temple. Elle avait compris, une fois dressée au milieu de leurs cadavres dégoulinants, que le nombre de compte pas, seule l’offrande compte, il fallait offrir le sang, faire couler les humeurs, ne jamais s’arrêter de tuer.



Aethyn faisait alors partie du Culte. La Grande Prêtresse la regardait depuis son promontoire, d’un air arrogant et suffisant. Aethyn n’était pas impressionné, mais elle ne savait pas à quoi s’attendre. En face d’elle, aux côté de la Prêtresse, elle pouvoir voir le Maître des Assassins, et plusieurs autres grandes figures du Temple. La cérémonie prenait fin, et Aethyn était couverte de sang. Le chaudron bouillonnait.
– Sang et âmes pour Khaine, Aethyn, le Dieu du Meurtre t’accueille pleinement en son culte.
– Sang et âmes pour Khaine.




Heshyr regardait le temple avec un dégoût certain. Les rues d’Har Ganeth lui semblaient amères et fades. Ce soir, elle avait fait couler le sang sans conviction. Ses lames dégoulinaient de sang sur les dalles de la Place du Temple. Har Ganeth est la ville du culte de Khaine, où le plus grand temple a été construit sur la colline qui surplombe toute la ville. Derrière Heshyr, des centaines de rues et d’impasses labyrinthiques s’étendent au pied de cet immense édifice. Heshyr se remémorait le premier jour de son pèlerinage à Har Ganeth, où le nœud au ventre, Aethyn était rentrée la première dans la ville avec sa sacoche noire de sang, pleine des têtes des voyageurs qu’elle avait rencontrés en chemin vers la Cité des Exécuteurs. Elle avait admiré ce même temple avec un profond respect et une certaine crainte du Dieu du Meurtre.
Aujourd’hui, la crainte était partie, elle se sentait on ne peut plus proche de Khaine, mais on ne plus différente de ce que le Temple lui avait appris. Elle savait. Et là, devant le Temple de la ville de Khaine, elle serrait plus fort encore ses épées longues en murmurant :
– Khaine vous fera payer votre arrogance et votre désir de pouvoir, le sang qui coule dans vos veines de calculateurs ne vous appartient déjà plus.

Elle ne pouvait s’empêcher de se remémorer les paroles de la sorcière de sang. Ces sorcières qui appartenaient autrefois au culte, et qui aujourd’hui sont aussi vieilles que le culte lui-même. L’annonce de la prophétie, l’arrivée de l’Elu de Khaine, aux côtés de sa fiancée, et le refus de la vérité par les autorités du culte. On lui avait montré la vraie nature du meurtre, Anwyr na Khaine était là et rien n’était plus agréable que de la voir répandre le sang pour son dieu. La rencontre lui avait valu un nouveau nom. Heshyr, le nom des sorcières de sang. Parce qu’elle avait ses dons que nul autres ne présentaient au temple, et qui relevait plus de la sorcellerie que de l’art martial. Elle était un mélange de la férocité des furies et de la spiritualité des sorcières. Elle avait été baptisée par la doyenne des sorcières de sang en personne, et porter ce nom était un véritable honneur. Elle pourrait rappeler sans cesse au temple leur véritable origine, la vraie foi.